Destinée aux casques de réalité virtuelle, la suite spirituelle de “What the Golf ?” enchante par son sens de la comédie physique, qui est aussi le principal carburant du très potache “Goat Simulator 3”.
C’est fou tout ce qu’on peut faire avec une batte de base-ball : verser des céréales dans un bol, repeindre un cheval en zèbre, brosser les dents d’un éléphant… Et jouer, bien sûr : au bowling, au flipper, aux jeux vidéo. Conçu pour les casques de réalité virtuelle par les créateurs danois du génial What the Golf ?, What the Bat ? n’est pas une simulation sportive, mais une joyeuse exploration des possibilités de l’objet et, pour cette raison même, une merveille de jeu burlesque.
Le burlesque, c’est d’abord le corps. C’est le choc, la chute, la maladresse, éventuellement la torsion et la déformation. Au cinéma, c’est le faux jumeau du film d’action – même lutte contre l’univers physique, même obligation de précision. Dans le jeu vidéo, majoritairement porté par une obsession de l’efficacité, le burlesque reste minoritaire malgré certains coups d’éclat (Untitled Goose Game, Octodad, les œuvres de Keita Takahashi…) et une présence plus ou moins appuyée dans le jeu de plateforme et notamment chez Mario, le Charlot du jeu vidéo. Mais What the Bat ? reprend les choses à la base.
Mutation virtuelle
En termes purement ludiques, on peut voir la création du studio Triband comme une héritière à la fois des mini-jeux absurdes mais rigoureux de WarioWare et du mini-hit VR multi-activités Job Simulator. La réalité virtuelle, ici, n’est pas qu’un élément accessoire car elle a pour conséquence d’impliquer profondément notre corps dans l’expérience. Les battes que l’on tient virtuellement au bout de chaque bras deviennent comme des prothèses auxquelles on croit, jusqu’à ressentir une brève incompréhension quand, entrant en contact avec un meuble réel, on constate qu’elles ne sont pas vraiment là ou, inversement, à redouter de détruire quelque chose dans la pièce en les agitant.
Jouer à What the Bat ?, c’est se voir offrir un nouveau corps et apprendre à s’en servir, parfois dans la douleur comme lorsqu’il s’agit de ramasser un toast ou de manipuler pour les scanner les articles défilant sur un tapis de supermarché. C’est se sentir tantôt virtuose (quelle ivresse !), tantôt dépassé (voire angoissé), et chercher régulièrement des moyens de ruser. C’est vivre une forme de mutation virtuelle, surtout, grâce à l’avalanche d’idées de ce jeu qui, ce qui ne gâte rien, devrait prochainement s’enrichir de chapitres supplémentaires.
GTA avec une chèvre
Sans la VR et dans un esprit plus potache et roublard, Goat Simulator 3 est un autre exemple de jeu vidéo burlesque qui gagne à être connu. Ici, nous sommes une chèvre lâchée dans un monde campagnard avec une liste de défis tous plus absurdes et destructeurs les uns que les autres. Le principe est celui du bac à sable et de la liberté d’action, au point que l’on ne sait parfois presque plus si l’on est dans une parodie de GTA ou dans GTA lui-même, mais avec une chèvre. L’idée, donc, est de nous fournir tous les outils nécessaires pour nous mettre en scène, entre calcul et improvisation, nos propres saynètes grotesques et débridées. Une nouvelle preuve éclatante que le burlesque est une chose sérieuse qui mérite d’être cultivée.
What the Bat ? (Triband), sur Meta Quest 1+2 et Steam VR, environ 25 €
Goat Simulator 3 (Coffee Stain North/Plaion), sur PS5, Xbox Series X/S et Windows, environ 30 €
“What the Bat ?” : une merveille de jeu vidéo burlesque – Les Inrocks